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TVA : soupçon de fraude

Fiscal - TVA : Compatibilité d'une procédure nationale avec les droits l'Union en cas de soupçon de fraude.
Par un arrêt du 12 février 2015 (CJUE, 12 février 2015, aff. C 662/13), la Cour de justice des communautés européennes, interprète la Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, relative au système commun de TVA (habilitant les États membres à adopter les mesures nécessaires à la lutte contre la fraude, mais ne prévoyant aucune disposition précisant concrètement le contenu des mesures qui doivent être prises par les États membres à cette fin) comme ne s'opposant pas à l'application préalable et obligatoire d'une procédure administrative nationale en cas de soupçon de fraude. Elle rappelle qu'en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, la mise en œuvre de la lutte contre la fraude à la TVA relève de l’ordre juridique interne des États membres en vertu du principe de l’autonomie procédurale de ces derniers.

En l'espèce, la société de droit portugais Surgicare avait fait construire un établissement hospitalier sur un terrain lui appartenant, et l'avait équipé en matériel médical.
Pendant la période de construction et d'installation de l'établissement hospitalier s'étendant de 2005 à 2007, elle n'avait pas réalisé d'opérations imposables, cumulant ainsi des crédits de TVA.
Lors de la cession de l'exploitation de l'établissement à une autre société du même groupe ayant les mêmes actionnaires, la société avait déduit la taxe due au Trésor au titre des loyers perçus du cessionnaire.
Le Trésor public avait estimé que la société avait fait un usage abusif du droit au remboursement de la TVA. Selon l'administration, la cession d’exploitation à une société créée à cet effet par le même groupe de sociétés avait pour seul but de permettre a posteriori à Surgicare de justifier l’existence d’un droit à la déduction de la TVA acquittée en amont lors de la construction et de l’équipement de l’immeuble, alors qu’elle n’aurait pas pu en bénéficier si elle avait exploité elle-même cet établissement hospitalier puisque cette activité est exonérée de la TVA.
Le Trésor public lui a alors notifié un avis de recouvrement de la TVA qu'elle estimait avoir été abusivement déduite sur la période des opérations litigieuses, assortie d’intérêts de retard, pour un montant total de 1 762 111,04 euros. Contestant cet avis de recouvrement devant le Tribunal fiscal de Lisbonne, Surgicare invoquait l’illégalité de l'avis au motif, d’une part, que le Trésor public n’avait pas appliqué la procédure spécifique obligatoire prévue par le code de procédure et de contentieux fiscal et, d’autre part, que les pratiques en cause n’étaient pas abusives. Déboutée en première instance, Surgicare invoquait en appel devant la Cour administrative suprême l'illégalité du recouvrement, du fait de la violation de la procédure fixée par le code de procédure précité. Constatant que le système de TVA puise sa source dans le droit de l’Union, la Cour décidait de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : «Dans un contexte dans lequel l’administration fiscale soupçonne l’existence d’une pratique abusive destinée à obtenir le remboursement de la TVA et dans lequel le droit portugais prévoit une procédure préalable obligatoire applicable aux pratiques abusives en matière fiscale, faut-il considérer que cette procédure ne peut pas s’appliquer dans le domaine de la TVA, eu égard à l’origine communautaire de cette taxe?»

Cette question visant à déterminer si le droit de l’Union en matière de TVA et notamment les dispositions de ce droit relatives à la lutte contre la fraude à la TVA, s’opposait à l’établissement, en droit interne, d’une procédure administrative que l’administration fiscale est tenue d’appliquer lorsqu’elle soupçonne l’existence d’une pratique abusive en matière fiscale, la Cour relève que la directive 2006/112/CE habilite les États membres à adopter les mesures nécessaires pour assurer l’exacte perception de la taxe et éviter la fraude, mais ne prévoit aucune disposition précisant concrètement le contenu des mesures qui doivent être prises par les États membres à cette fin. Elle conclut qu'en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, la mise en œuvre de la lutte contre la fraude à la TVA relève de l’ordre juridique interne des États membres en vertu du principe de l’autonomie procédurale de ces derniers et qu'il leur appartient de désigner les autorités compétentes pour lutter contre la fraude à la TVA et de régler les modalités des procédures destinées à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, sans rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité). Elle conclut que la procédure prévue par le code de procédure et de contentieux fiscal avait bien lieu à s'appliquer et ne rendait pas impossible ni difficile la mise en oeuvre des droits que les justiciables tirent du droit de l'Union. CJUE, 12 février 2015, aff.C-662/13 - Surgicare

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