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Fonction publique : engagement de la responsabilité de l'Etat pour délai de jugement lorsque la durée de l'une des instances a une durée excessive

Dans un considérant de principe, le Conseil d'Etat a rappelé dans un arrêt du 23 décembre 2015, n° 385172 que, lorsque la durée globale de jugement devant la juridiction administrative n'a pas dépassé le délai raisonnable, la responsabilité de l'État est néanmoins susceptible d'être engagée si la durée de l'une des instances a, par elle-même, revêtu une durée excessive. 

Ce considérant est ici repris : 

"2. Considérant qu'il résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables ont droit à ce que les requêtes soient jugées dans un délai raisonnable ; que, si la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure, les justiciables doivent néanmoins pouvoir en faire assurer le respect ; qu'il en résulte que, lorsque leur droit à un délai raisonnable de jugement a été méconnu, ils peuvent obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices tant matériels que moraux, directs et certains, causés par le fonctionnement défectueux du service de la justice et se rapportant à la période excédant le délai raisonnable ; que le caractère raisonnable du délai doit, pour une affaire, s'apprécier de manière globale, compte tenu notamment de l'exercice des voies de recours, et concrète, en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement de la procédure, de même que le comportement des parties tout au long de celle-ci, et aussi, dans la mesure où la juridiction saisie a connaissance de tels éléments, l'intérêt qu'il peut y avoir pour l'une ou l'autre, compte tenu de sa situation particulière, des circonstances propres au litige et, le cas échéant, de sa nature même, à ce qu'il soit tranché rapidement ; que lorsque la durée globale de jugement n'a pas dépassé le délai raisonnable, la responsabilité de l'État est néanmoins susceptible d'être engagée si la durée de l'une des instances a, par elle-même, revêtu une durée excessive ;"

Si la validité du jugement n'est en soit pas remise en cause, le requérant est bien fondé à engager la responsabilité de l'Etat pour délai excessif du jugement. 

Les faits à l'origine de l'arrêt sont les suivants : 

M. B., professeur des universités-praticien hospitalier a fait l'objet d'une mesure de suspension de ses fonctions, par un arrêté ministériel du 12 avril 2006. La juridiction disciplinaire a été saisie le jour même. Après avoir entendu l'intéressé, ordonné les mesures d'instruction nécessaires, puis reçue en mars et en septembre 2007 les rapports d'expertise demandés, elle ne s'est réunie à nouveau que le 10 décembre 2010, soit 3 années après qu'elle disposait de tous les éléments lui permettant de se prononcer, pour juger que les faits reprochés à M. B. n'étaient pas établis et proposer la reprise de son activité professionnelle.

C'est dans ce contexte que M. B. a demandé, sans succès, aux ministres compétents réparation des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis en raison de la durée excessive de la procédure juridictionnelle relative à la mesure de suspension prononcée à son encontre.

Le Conseil d'État a rappelé que :

"le caractère raisonnable du délai doit, pour une affaire, s'apprécier de manière globale, compte tenu notamment de l'exercice des voies de recours, et concrète, en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement de la procédure, de même que le comportement des parties tout au long de celle-ci, (...) que lorsque la durée globale de jugement n'a pas dépassé le délai raisonnable, la responsabilité de l'État est néanmoins susceptible d'être engagée si la durée de l'une des instances a, par elle-même, revêtu une durée excessive".

En l'espèce, il a considéré que dès lors que l'affaire ne présentait pas de difficulté particulière, le délai de trois ans et deux mois qui s'est écoulé, entre le moment où la juridiction disposait des éléments qui lui permettaient de se prononcer et la date où elle a statué, est excessif. M. B. s'est vu allouer la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral consistant en des désagréments qui vont au-delà de ceux habituellement provoqués par un procès. Le Conseil d'État n'a pas indemnisé le préjudice matériel, faute d'avoir été établi par le requérant.

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